Raphaël Denis
La loi normale des erreurs
La spoliation des oeuvres d’art par les nazis sous l’Occupation est au coeur de ce travail. Constitué d’un portrait peint à l’huile et de cadres savamment retournés et de différentes tailles, ces tableaux créent l’absence et dénoncent l’horreur de ce pan de l’Histoire. Raphaël Denis s’intéresse de près au marché de l’art et aux collectionneurs, La loi normale des erreurs évoque ainsi le rapport à l’objet “oeuvre” ainsi que sa valeur pécuniaire, sentimentale ou intellectuelle. En retournant ces cadres, dont les dimensions rappellent réellement celles d’oeuvres spoliées, l’artiste inscrit le numéro d’inventaire apposé par l’administration nazie en charge du dépouillement et correspondant à l’oeuvre en question. Ce numéro fait apparaitre l’absence de l’oeuvre et se substitue à elle. Au dos, l’artiste a néanmoins collé la notice de l’oeuvre avec sa photographie et ses informations techniques. Enfin, l’installation de l’oeuvre n’est pas anodine, elle rappelle les zones de stockage où étaient accumulées les oeuvres en attente de destruction ou de récupération par de hauts dignitaires nazis, lorsque celles-ci n’étaient pas estampillées “art dégénéré”. Le portrait de l’anonyme trônant au-dessus de cette ligne de tableaux pourrait tout aussi bien être celui d’un collectionneur ou d’une personnalité politique de cette période, ou bien encore ” le témoin muet, voire, la conscience universelle”, une définition proposée par Daniel Bosser, collectionneur français.